Comme disent les bureaucrates, nous avons « gagné une heure de sommeil » dans la nuit du 24 au 25 octobre. Mais a-t-on pensé aux conséquences délétères de ce changement d’horaire qui continue de s’appliquer de façon systématique depuis près d’un demi-siècle ? Il est en effet à craindre que, cette année en particulier, la coutume nous coûte beaucoup plus cher qu’elle ne nous rapporte…

Son instauration au milieu des années 70 se justifiait car, à cette époque lointaine, nous avions des idées à défaut de pétrole. Mais aujourd’hui, les idées ont été remplacées par des principes, l’économie évincée par l’écologie et la production électrique d’origine fossile supplantée par les sources non carbonées. Le passage à l’heure d’hiver n’a plus grand intérêt depuis longtemps.

Par contre, nombreux sont les effets indésirables de cette mesure, initialement temporaire, devenue tradition. Au premier rang statistique se placent les accidents de la voie publique. Ceux-ci se produisent essentiellement aux heures de sortie de bureau. À la tombée de la nuit, la baisse de luminosité rend les piétons et les cyclistes moins visibles aux yeux des automobilistes qui les envoient dans des hôpitaux où les lits manquent déjà cruellement et où le personnel soignant a été mis à rude épreuve depuis le début de l’année. D’autant que, si certains ont gagné une heure de sommeil, ceux qui travaillent la nuit ont récupéré une heure de labeur supplémentaire.

Par ailleurs, la perturbation des rythmes biologiques provoque des difficultés de concentration dans la journée, voire des endormissements diurnes responsables d’accidents du travail ou domestiques. Sans compter les syndromes anxiodépressifs, les troubles du sommeil, les pathologies psychosomatiques, les douleurs rebelles, les problèmes cardiaques ou les symptômes digestifs. Dans les jours qui suivent le dernier dimanche d’octobre, les consultations médicales explosent, tout comme les prescriptions médicamenteuses et les arrêts de maladie. Cela grève le budget de l’Assurance Maladie, effaçant du même coup les éventuelles économies d’énergie espérées.

Les personnes âgées, en particulier celles atteintes d’une démence de type Alzheimer ou apparentée, présentent ce que les soignants en Ehpad connaissent sous le nom de syndrome crépusculaire. L’exacerbation des troubles psycho-comportementaux au coucher du soleil accroit considérablement l’angoisse des résidents et les manifestations perturbatrices qui en découlent, comme la déambulation, l’agitation, l’agressivité ou les cris.

D’après une étude européenne, l’heure d’hiver fait perdre 200 heures d’exposition solaire par an. Le corollaire en est la dépression saisonnière, avec son cortège de désagréments parfois sévères. On y retrouve les marques de tout épisode dépressif, comme la tristesse permanente, la fatigue anormale au réveil, la perte d’intérêt pour quoi que ce soit, auxquelles s’ajoutent certaines particularités caractéristiques comme une tendance à trop dormir et une appétence excessive au sucre responsable d’une prise de poids hivernale.

Quelques petites astuces pour amortir le décalage… Pourquoi ne pas le répartir sur plusieurs jours, en se couchant et en se levant un quart d’heure plus tard jusqu’à la date fatidique. Certains spécialistes du sommeil conseillent de commencer un mois à l’avance, et de différer levers et couchers d’un quart d’heure chaque semaine. Cela permet d’adapter progressivement la sécrétion de l’hormone du sommeil. Il conviendra alors de résister un peu le soir par des activités ludiques comme des jeux de cartes ou de société, voire des conversations téléphoniques, en bannissant les excitants comme le thé ou le café. Pour les personnes usant de somnifères, préférer la mélatonine ou les tisanes à base de plantes relaxantes.

On proposera des ballades matinales plus stimulantes pour un réveil dynamique en profitant du fait que si la nuit tombe plus vite le soir, le jour se lève plus tôt le matin. La luminosité de l’aube permet de recadrer notre rythme biologique et l’exercice matinal s’avère bénéfique pour renforcer nos facultés d’adaptation. Le principe global sera de capter quotidiennement un maximum de lumière solaire. Pour cela, on ouvrira les volets dès potron-minet pour que nos rétines accumulent un maximum de lux, cette unité de d’éclairement lumineux, en sachant que la lumière du jour apportera toujours, même quand le ciel est bas et gris, nettement plus de luminosité que des lampes artificielles. Sauf bien sûr, s’il s’agit de luminothérapie à utiliser une demi-heure à une heure de préférence le matin.

On pensera à compenser les carences en vitamine D dont la fabrication par notre corps disparait en hiver. Prendre en une fois,chaque mois, de novembre à avril environ 100.000 unités en ampoules buvables, à avaler pure ou avec un corps gras comme de l’huile ou du beurre. Renforcer les défenses immunitaires par les probiotiques dix jours par mois en association avec des oligosols de soufre, cuivre et manganèse par voie sublinguale. Sur le plan alimentaire, on choisira les fruits riches en vitamine C comme les agrumes ou le kiwi et on s’intéressera également à la propolis dont les abeilles nous font cadeau pour lutter contre les infections automnales.

Mais entre nous, n’aurait-il pas été plus simple de supprimer cette tradition devenue absurde et anachronique ? Chaque année, on nous promet de mettre un terme définitif au changement d’horaire saisonnier et tous les ans la décision est reportée. De nombreux pays européens ont même organisé à plusieurs reprises des référendums afin que les citoyens puissent exprimer leur préférence pour maintenir en permanence l’heure d’hiver ou l’heure d’été. En France, à l’instar des autres pays latins, les deux tiers des votants ont choisi cette dernière. Alors pourquoi avoir continué à tergiverser ?

En 2020, la situation sanitaire mondiale est catastrophique. Le virus couronné a envahi la planète entière, touchant tous les pays sans distinction de situation géographique, de statut économique, de climat ou de couleur de peau de ses habitants. Certaines nations s’en sont, jusqu’à présent, mieux sorties que d’autres par une meilleure gestion de la Covid. Des pratiques, telles que les gestes barrières ou le port du masque ont produit des effets d’autant plus protecteurs qu’elles étaient plus précoces et plus généralisées. En matière de santé publique, l’anticipation est la mère de l’efficacité. En la matière, nous ne sommes plus les premiers de cordée. On aurait pu reprendre l’initiative, redevenir leader d’opinion, montrer qu’en France, on n’a pas plus de pétrole, mais on a toujours des idées. Malheureusement, ce sera encore une occasion manquée dans cette pandémie de l’indécision politique.

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