La première fois que j’ai mis les pieds dans un bloc opératoire, je devais être en cinquième année de médecine. J’étais aussi mal à l’aise et emprunté qu’un ingénu à son premier rendez-vous galant. Je gardais bêtement les mains en l’air, n’osant rien toucher de peur de commettre l’irréparable faute d’asepsie. Après m’avoir suggéré, avec un sourire goguenard, de baisser les bras au prétexte qu’il ne s’agissait pas d’un braquage, le chirurgien me demanda, sur un ton redevenu aussi tranchant qu’un bistouri, si je m’étais déjà lavé les mains dans ma vie. Je bafouillai un « oui, bien sûr » en le scrutant anxieusement pour deviner où il voulait en venir. Il reformula alors sa question : « As-tu déjà fait une aide opératoire ? » Je lui répondis : « Non, c’est mon premier stage en chirurgie ». Sa répartie s’inscrivit à jamais dans ma mémoire : « Alors tu ne t’es jamais lavé les mains ! »

L’anecdote résume bien l’importance du lavage des mains avant toute intervention chirurgicale. Ce nettoyage méticuleux, pendant de longues minutes, traque le moindre germe susceptible de déclencher une infection post-opératoire parfois gravissime. Sans atteindre une telle minutie, tous les soignants ont l’obligation professionnelle de respecter les règles hygiéniques qui leur ont été inculquées lors de leur formation, puis rappelées régulièrement afin d’éviter les maladies nosocomiales.

En 1995, des médecins suisses de l’hôpital de Hambourg, qui avaient mis au point vingt ans plus tôt la formule de la solution hydroalcoolique actuelle, l’ont offerte à l’OMS pour que l’ensemble de l’Humanité en profite. Bel exemple de désintéressement altruiste dont aurait pu s’inspirer Pfizer qui vient d’augment de 20% le prix de son vaccin… ! Dès lors, l’utilisation du soluté hydroalcoolique, baptisé SHA, s’est répandue comme une trainée de poudre chez les soignants, leur évitant de rechercher un point d’eau pour accomplir leurs multiples ablutions quotidiennes. Mais pour être efficace, la technique se doit d’être irréprochable.

Or il existe un test infaillible, bien connu des professionnels de santé, qui utilise la « boite à coucou ». Sous ce drôle de nom, se cache un gros caisson ressemblant à un radar de chantier, doté d’une lampe à ultraviolets et percé de deux trous pour passer les bras. Un système optique complète l’ensemble en permettant de voir à l’intérieur de la machine. L’exercice consiste alors à se frictionner les mains avec un produit similaire au SHA contenant une substance fluorescente. On met ensuite les mains dans la boite et la lumière noire du caisson dévoile les zones où le gel a été appliqué correctement, tandis que les parties qui restent sombres n’ont pas été imprégnées. Les microbes y sont toujours cachés et nous font « coucou ! ».

Cette méthode a l’avantage d’être à la fois très pédagogique et totalement ludique. Le caisson est léger, ce qui le rend facilement transportable pour illustrer la démonstration de la bonne technique pour un nettoyage efficace. On pourrait ainsi installer temporairement ces boites dans les structures hospitalières, les maisons médicalisées, les EHPAD, les établissements scolaires… et les vaccinodromes. Cela constituerait un excellent moyen de sensibiliser le grand public à l’hygiène des mains, laquelle représente certainement la méthode la plus performante pour faire barrage à la contamination virale interhumaine.

En effet, il est assez absurde et inopérant d’imposer la vaccination tous azimuts et de négliger dans le même temps les gestes barrières. La première protège les individus et ne devrait concerner que les personnes à risque. Les seconds évitent la diffusion du virus et éteignent la pandémie. Je suis nettement moins inquiet d’être en contact avec un non vacciné aux mains propres et portant un masque que lorsqu’un vacciné s’approche de moi, son pass sanitaire à la main mais sans aucun respect des gestes barrières. Finalement, en matière de mesures sanitaires, on marche sur la tête. Il est regrettable que les méthodes si efficaces contre la Covid de 2003 n’aient pas été reconduites en 2020. Des conditions d’hygiène extrêmement strictes avaient été instaurées à l’époque dans de nombreux pays : interdiction de cracher, port de masque sanitaire, obligation de se laver souvent les mains, de passer sur des paillassons désinfectés avant d’entrer, et ce quel que soit l’endroit. Et une véritable quarantaine sans permission de sortie quotidienne. Tout cela avait enrayé l’épidémie en quelques semaines avec moins de 800 décès sur la totalité de la planète… et sans aucun vaccin !

Ainsi, au lieu de gaspiller nos impôts dans une propagande audiovisuelle en faveur de la vaccination, publicité bien inutile depuis l’invention du sauf-conduit obligatoire, n’aurait-il pas mieux valu expliquer, images à l’appui, de façon simple et didactique les trois principaux gestes à connaitre et à pratiquer en permanence ? La pose du masque jusqu’à la racine du nez, sous les lunettes, et recouvrant de façon étanche le menton, à changer régulièrement. La distance physique, et non pas la distanciation sociale qui ne veut rien dire et revêt une connotation sectaire déplaisante, que l’on mesure très simplement en mettant les deux bras à l’horizontale comme dans les rangs des militaires.

Quant au lavage des mains, on doit cesser de le bâcler avec une goutte de SHA dans la paume de la main, trois petits tours et puis s’en va. Car il faut bien se l’avouer, ça ou rien, c’est pareil ! Alors, voici en résumé les six étapes incontournables d’un nettoyage efficace des petites mimines : d’abord paume sur paume, puis paume sur dos de l’autre main, puis doigts entrecroisés, puis bout des doigts sur l’autre paume, puis autour des pouces et enfin autour des poignets, l’ensemble nécessitant une grosse noisette de désinfectant et environ trente secondes. Cela fera de vous des champions de la « boite à coucou » et surtout des adversaires actifs de la diffusion infectieuse.

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